vendredi 4 décembre 2020

Le vieux camion.

 Avertissement: toute ressemblance avec personne ou situation existante ou ayant existé est pure coïncidence.. Ce texte est issu de l'imaginaire et revisité par un complément d'imaginaire...hum...



Sur une image d'archives familiales, années 50,
 la camionnette de mon père en fond.
Quant à moi, on me reconnait!

Sur des images bien réelles glanées au cours de mes pérégrinations, une manière de rendre hommage à si belle relique...

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C’est l’histoire d’un vieux camion jailli des usines voilà quelques décennies. Flambant neuf, il avait la vie devant lui, mais la vie d’un camion est comme celle des humains, pleine d’aléas, d’embûches et pouvant s’arrêter du jour au lendemain.




Sa carrosserie sombre et lustrée, ses roues minces, son grand plateau de bois brut surmonté de ridelles de bois blond et verni lui conféraient belle allure. 
Deux gros yeux ronds et curieux, un peu myopes, lui donnaient une vue à court terme, mais qu’importe, les routes n’étaient pas encombrées et la vitesse lente.


Dans la cabine, un siège de moleskine noire, un peu dur aux entournures ne permettait pas un doux engourdissement au volant, d’autant que le volant, énorme et mince, assisté uniquement pas les gros bras du chauffeur était à lui seul un banc de musculation.



Le levier de vitesse, monté du sol comme un fluet champignon, surmonté d’une boule de noire bakélite, demandait adresse et dextérité pour passer les vitesses qui, par chance, n’étaient pas nombreuses. Ma description s’arrêtera là, rien n’était  assisté sur ce véhicule hormis par les muscles et les sens en éveil du chauffeur.

Voilà qu’un jour, bien des décennies après, ce gentil et serviable camion qui profitait d’un repos bien mérité, reprit du service et quel service ! Plus il vieillit et plus il prend du service et plus on exige de lui ! ça alors…mais c’est un bon camion qui a si souvent courbé l’échine qu’il fait son chemin sans rechigner…ou presque.


L'oeil du rétro

Sa carrosserie ternie, un peu boursouflée de vieilles cicatrices, dépolie par l’âge s’est vue embellir d’une grande bannière : «  Multiservices. Service rapide et en tout genre ». On n’a pas ajouté encore « de jour comme de nuit » mais cela peut venir.

Et le voilà parcourant les routes, en faction devant un supermarché, une pharmacie, une boulangerie ou autre banque, un magasin de mots fléchés croisés ou emmêlés, une herboristerie, bref tout ce qui est indispensable au quotidien du destinataire.

Le chauffeur court, vole et virevolte, un peu bancal aussi, il est aussi vieux que le camion.

Le chauffeur n’a qu’une consigne, mener à bon port et dans de brefs délais les articles demandés. Pas plus que son camion il ne doit souffrir la moindre défaillance : pas de dos rompu, de tendinite, de céphalée, de gingivite, d’otite ou de cheville vacillante, de muscles endoloris et j’en passe. Le camion lui, se doit malgré son grand âge, d’avoir ses rouages bien huilés. Toute crevaison, panne, incident ou accident est écarté d’un geste péremptoire et rageur. Même pas envisageable, je vous prie ! Quant à se permettre une balade pour le loisir ce n’est pas davantage envisageable : pensez donc ! Une avarie au chauffeur…ou au camion…ou aux deux à la fois….Seule la mort de l’un ou des deux éviterait la fusillade furieuse à l’arrivée.. Alors le camion, en cachette, s’offre de belles balades et comme ce n’est pas un camion salarié, il peut tricher ! Et puis il reprend du service comme si de rien n’était…

Alors le chauffeur se démène, pour trouver l’article commandé, et le livrer à bon port.

Avec un peu de chance, le bon port se trouve en altitude, non pas en montagne, mais au terme d’un de ces escaliers des maisons d’autrefois qui vous met le 1er étage directement au niveau du 3 eme d’aujourd’hui. Au terme d’un escalier qui nous rend chanceux s’il n’est pas en colimaçon…Les vieilles pattes du livreur vont et viennent comme des ailes d’abeille besogneuse, dans un silence sépulcral ou presque puisque le destinataire exècre la parole.

Et lorsqu’enfin le chauffeur retrouve son vieux camion, il apprécie la détente, le repos du volant pour gros bras, le levier de vitesse aussi délicat qu’une porcelaine de Sèvres, le siège au moelleux de « Poltrone e Sofa », le doux ronron aux déciblels de Metal , il s’en va ranger son véhicule avec une caresse sur la carrosserie et soupire « Mission Accomplie » !

 

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Quelques uns (unes) se reconnaitront peut être dans ce vieux camion et ce chauffeur indissociables. C’est peut être vous, c’est peut être moi, au service d’une personne (très) âgée, ou pourquoi pas ? d’adolescents exigeants. Mais au fond ces générations des extrêmes ne se ressemblent elles pas ?


1 commentaire:

  1. Une autre relique découverte hier en passant par Flassa, un tracteur d'un rouge passé, délabré, gisait là. Nous avons comme toi pensé à tous les vieux camions, vieux tracteurs rouillés perdus dans des friches... Celui-ci a traversé bien des vicissitudes. Son propriétaire était le dernier habitant du village, il en a labouré des prés, tiré du bois sur ces pentes abruptes ... J'ai cherché un indice pour connaitre sa marque de fabrique, le temps a tout effacé. Je ne peux joindre sa photo ici, je la mets sur ma page Facebook.

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