mardi 30 juin 2020

Mes carnets de montagne


L'écriture est un peu ma seconde peau.


Pourtant (ou alors parce que...) on m'a assez répété : "N'écris pas !!".
On m'a aussi assez répété : "Ne parle pas !!". Alors que faire et comment vivre ainsi ?
Donc j'écris et je suis bavarde.




J'ai déjà publié un blog sur mes carnets, aujourd'hui j'en suis au 38 eme, j'ai eu des périodes de flottement, leur course est ralentie.
Une papeterie originale de Perpignan, dont la patronne est une jeune femme originale, me fournit. Cette jeune dame m'a conté son histoire et son goût pour les beaux spécimen, une sorte de "Madeleine de Proust" reliée à son enfance la fait baigner - et nous avec- dans les beaux articles : papiers, carnets, crayons et stylos etc...

Alors, mes carnets de montagne, je vais les dénicher dans sa caverne! Il faut qu'ils parlent évasion et voyage.
Dans mon sac à dos j'emportais jadis mes gros cahiers : volume et surpoids...


J'ai allégé et écrémé et, à présent, ces petites merveilles colorées me servent à nicher toutes mes données, impressions, chiffres et lettres, croquis, je remplis le moindre espace en long, large ou travers afin de conserver l'esprit du carnet. Ils ont leur place dans ma "carnetothèque" et une place de choix, même si après la rando ils ne me servent plus à rien sinon le temps d'un blog.




Quand je les regarde, les chiffres prennent beaucoup de place.







Parce que j'aime les chiffres même si je manie plutôt les lettres!


Je me suis demandé d'où me venait ce goût des chiffres depuis l'enfance. A part l'hérédité paternelle, je ne vois pas...


Mais si, bien sûr ! puisqu'on me disait "n'écris pas" et "ne parle pas" on ne m'a jamais dit par contre "ne compte pas" !
Alors j'ai tant et si bien manié les chiffres qu'à un moment de mon adolescence je me suis lancée dans une écriture codée en chiffres. C'était long, fastidieux, pas pratique mais si je l'avais bossé, j'écrirais couramment.
Ainsi "n'écris pas !" s'écrirait "35.2.12.43.3.44. 41.1.44 !" imaginez l'écriture, imaginez la relecture ! J'aurais fusillé mon cerveau !
Depuis peu de temps j'ai encore "écrémé" la matière car chaque fois que je voulais prendre des notes, je devais poser le sac, récupérer carnet et crayon etc...etc..Que de manips !
A présent un petit carnet de brouillon est tiré de la poche en marchant, avec son crayon et je note tout en chiffres, un mot ou autre pour noter un bruit, une impression, une pensée et ensuite je recopie en étoffant dans le carnet de montagne.



Il y a des croquis aussi ; quand je prépare une rando hors circuit balisé et aseptisé, là où il faut mettre tous ses sens et neurones au boulot, je fais des croquis issus de mes recherches sur géoportail style "A telle distance et telle altitude (à quelques m près) je dois trouver un départ de sentier...ou une source...ou un gros éboulis..." enfin tout ce que m'indique géoportail et ses assesseurs : carte IGN, carte Etat Major, Carte de Cassini parfois, vues aériennes des années 60 et de nos jours ! Mon GPS utilisé en altimètre et en distances, ma carte IGN font le reste, dopés par mon intuition et mon sens de l'orientation, ainsi que mon habitude à lire le terrain.


La vue aérienne est capitale mais il est vrai qu'en moyenne montagne elle ne sert guère : on n'y voit que des arbres !! Cependant la moindre clairière devient bavarde !

Ah la préparation artisanale est sportive. Mais...je me refuse de tout mon être à suivre aveuglément un GPS, pour moi cette quête est encore plus importante que la rando en elle même, c'est un jeu addictif.
A la pause, je sors mon "vrai" carnet et je note mes impressions, quelques détails enfin cela fait un peu "poète à la montagne"...Je dessine aussi...je prends des azimuts pour identifier un sommet inconnu, bref la rando est studieuse, mine de rien...
Parfois cela donne des scènes cocasses, comme cette dubitative, ou mortifiée, Dame devant ces chiffres


Ou cette page écrite en montant au Pic Estelle, ce 5 janvier dernier et sur laquelle, face aux croquis de dissections de Léonard de Vinci, j'écrivais  "Parler aux morts, dire aux vivants ce qu'on aimerait leur dire et qu'on ne leur dira jamais, faire quelques petits tours et détours dans sa propre histoire, se laisser aller à mi voix à des conciliabules où personne ne viendra vous dire "tais toi"', que personne n'entendra ni ne jugera. Mais aussi se taire tout simplement..." tout en contemplant et dessinant le Canigou logé sur la double page précédente. Mes carnets ne racontent pas que la montagne....


Mon carnet du moment est motorisé, j'aime la moto je l'ai trouvé sévère et intéressant.













Le prochain, Jules Verne, sera une belle invitation au voyage.








Mais le top du top , moment fortuit, c'est lorsque sur le carnet Monet est apparue une passerelle semblable à celle qui était sur mon chemin et que j'allais emprunter pour traverser une rivière : quel message !!


Quant à mes "Carnets de Vie", le 38 eme, habillé à l'ancienne d'une fausse couverture de moleskine rouge, il est bien gardé par Nina !




Sur ses pages blanches, à la tombée du soir, je suis partie dans les gorges de la Carança lancer quelques impressions comme on lance des cailloux dans l'eau. Les oiseaux passaient en criaillant, vrillant le bruit du torrent. J'étais bien...Soudain la pluie est arrivée, et, protégée par l'auvent de la falaise, je n'ai rien vu jusqu'au moment où postillons du torrent et du ciel se sont mêlés pour venir étoiler ma page. Moment de solitude heureuse.
Solitude "Carancéénne"





Ecrire est un plaisir dont il  serait machiavélique 

de faire une interdiction

10 commentaires:

  1. Tu es fascinante Amedine ! Je t'embrasse

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  2. Pas de GPS...les traces, les indices, les sensations, les impressions, parfois l'inquiétude d'être paumée..tout de l'aventurière...la plume et l'humour en plus. J'adore ...Roberte

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    1. Merci Roberte, vous rencontrer tous deux sans se connaître encore, juste par mots et blog, quel plaisir! C'est comme rencontrer un nouveau sentier non aseptisé, à réinventer et découvrir. Toutes mes amitiés plus que virtuelles déjà. Amédine

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  3. Aïe caraï....je me doutais que tu cachais des merveilles ! Là je découvre l'écrivaine, celle qui après nous avoir régalé par ses écrits de randonnée nous dévoile une autre facette, celle du ressenti profond. Cette part de secrets intimes mais que tu aimes partager. J'ai lu mais je vais encore relire. Bravo ! A quand un livre....? Bon dia tinguis senyora !

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    1. Oh tu sais bien souvent je publierais des choses plus personnelles, j'avais créé ce second blog pour cela mais je n'ai jamais trop osé me livrer, je dis déjà beaucoup dans mes récits de montagne, et j'ai peur que me livrer soit un grand manque de pudeur et de modestie...Quand on écrit un livre c'est différent, sur un blog ça peut faire (de mon point de vue) prétentieux. Bises t merci pour ce commentaire délicieux

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  4. Voilà un nouveau billet plein de poésie. Amédine tu es une femme kaléidoscope. Je ne donnerai pas mon avis franc par écrit sur le "Tais-toi" ou "N'écris pas", mais cela s’apparente à du totalitarisme. Heureux sommes-nous que tu es bravée ses interdits pour offrir tant de beaux mots.Merci Amédine, ne change surtout pas.

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    1. Un ami très cher me surnommait la femme à mille facettes ! Ce qui revient donc au même...Je crains souvent que mes récits donnent l'impression d'une femme prétentieuse ce que je suis loin d'être, mais entre l'être et le paraître, le pas est vite franchi. J'adore écrire donc je t'écoute : je ne changerai pas. Gracias, cher Ludo

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  5. Tu donnes vie à tes explorations, chaque fois que je te lis je pense à Alexandra David Néel. Continue à nous régaler avec tes récits, les chiffres et les lettres font bon ménage. Bises.

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    1. J'ai beaucoup admiré Alexandra David Neal et Isabelle Eberhardt morte noyée à 27 ans en plein...Sahara ! Oui dans un oued..Les aventurières du temps jadis étaient des extraterrestres mais leur écriture était belle. Bises à vous trois, même si je ne sais pas embrasser les chiens, ça s'apprend

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