Dans le hameau - ou le
village - de L...en Hérault, je rencontrai une Dame et son chien. Un chien
très accueillant, quoique très mouillé, rêvant de s'ébrouer devinez sur qui ?
Ce fut chose faite et rondement menée..
La Dame, robe légère
et longue, cheveux retroussés en anarchique chignon, un panier à la main,
répondit à mon bonjour et même à ma question concernant le four. Pas pour le
reste, elle n'était ici que depuis un an. A ma suivante question, davantage une
assertion, elle ajouta : " C'est un choix que de ne pas faire connaître
L...et de n'y attirer personne. On y est si tranquilles…Quand on fait une fête,
c’est entre nous, gens des hameaux. C’est le prix de notre tranquillité »…
Donc, par souci de
discrétion je ne citerai pas le nom.
Toutefois, je me dis
que les gens qui y vivent ont été contents, un jour, de le trouver accueillant
au point de vouloir y faire leur nid ; nid qu’ils défendent aujourd’hui
farouchement, repoussant le moindre intrus. Oubliant qu’ils le furent un jour,
eux qui sont hollandais, anglais ou français avec un accent venu d’ailleurs.
Toutefois, à eux l’honneur
de sauver de la ruine ce hameau, ces maisons et ces jardins abandonnés ou
ruinés. Cela reste un questionnement récurrent, auquel chacun a sa réponse.
Il reste au moins un
habitant du cru ici, l’Historien du village, 90 ans, je n’aurai pas le plaisir
de le rencontrer. Il se terre dans ses murs à l'abri de la chaleur épaisse
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Donc en ce dimanche
dernier, je venais de longer sans m’arrêter Roquebrun sur Orb, un magnifique
village très touristique, étagé à flanc de collines et les pieds dans l’eau. Avec un éventail de vignes à ses pieds, de l'autre côté du fleuve. Une armée de canoës glissait sur le fleuve, les terrasses ombragées faisaient le plein
et si, par le passé, j’ai bien visité ce village, ce fut en saison plus calme. Qu’il doit être
beau par une nuit de pluie ! Je passai mon chemin, le fleuve m’attirait, j’irai
le chercher plus loin.
Roquebrun sur Orb |
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L…est un fait du
hasard, un panneau l’indique et me voici sur une route très étroite, très
sinueuse qui s’enfonce au cœur des collines . Des anciennes carrières de
marbre, interdites aux grimpeurs, ont ma visite. J’apprendrai qu’elles furent
de marbre incarnat, se cachant sous une peau rugueuse et marron due à l'oxydation , exploitées au
17 eme siècle par des italiens qui trouvaient ce marbre plus beau que le marbre
italien et qu’elles eurent même la prétention de supplanter celui de Caunes Minervois.
Une des carrières |
Le mur qui fut rouge |
Détails et inclusions |
Je continue mon sinueux
chemin et soudain, au détour d’un virage, nichées dans la verdure, un groupe de
maisons altières, imposantes et délabrées m’indiquèrent le terminus : j’étais
à L…
Une rivière mince
passait sous un pont majestueux à 4 arches , je posai ma voiture au parking et
m’en allai à la rencontre d’un petit paradis qui, je le comprends, put séduire
les gens venus d’ailleurs.
Imaginez des ruelles
qui n’en sont pas : sentiers, escaliers, passages couverts et même un
ravin cimenté. Tous très escarpés car étagés sur une pente ardue. Imaginez des frondaisons immenses recouvrant les maisons,
imaginez des cours ombragées où l’on boit le thé en parlant anglais, des
voûtes, des arches, et des pierres, des pierres partout, sur les toits, les
murs, les rues et même au plafond des passages couverts.
Des arbres, des
fleurs, des lianes, un couvert végétal filtrant la lumière et enveloppant d’un
voile vert votre balade..
Voici le très ancien four à pain, four majestueux,
dont le toit enjambe la rue, dont la porte est faite d’une lourde pierre
cerclée de fer, porte que l’on ouvre sur un antre noir que la lumière du flash
va réveiller un court instant, photo surprise. On croirait un court instant sentir l'odeur de la croûte, de la mie chaleureuse du temps d'antan.
Intérieur du four |
La porte du four |
Et puis le chant des cigales
par-dessus tout ce décor.
Imaginez et si vous le
trouvez, certes pas sur votre route, c’est une impasse, mais au hasard de votre
curiosité, prenez le temps de vous y promener, d’user vos mollets dans les
sévères grimpes et savourez…
Lorsque je revins à ma
voiture, garée près du pont aux quatre arches, je descendis à la rivière, filet d’eau chantonnant
et étroit.
Le passé parla du temps où le pont n’existait pas, ou un chemin
pavé, passant à gué reliait le village à la vallée ; les jardins en ruine
ou non, racontent la domestication de l’eau, l’occupation minutieuse et
vivrière des lieux, les fruitiers qui s’étageaient au fil de l’eau et soudain incongru
et poétique, dans ce hameau où l’on ne veut attirer personne, un panneau m’invita…Je
n’entrai pas…Et pourtant j’aurais pu…
Mais si vous manquez ce hameau, il en est d'autres, en Hérault, tout aussi charmants, poétiques et surprenants, je me souviens en avoir parcourus quelques uns au temps de mes anciens vagabondages. Dans ces derniers, il y a toujours un hameau oublié qui me tend ses bras ruinés mais vivants, vivants de cette nouvelle vie que leur donne leur condition de ruine dans la lumière glauque de la végétation qui les envahit.